Prête à capturer l invisible
Cela fait bien longtemps que je cohabite avec mon syndrome de l’imposteur, même lorsque je n’étais pas encore photographe professionnelle. D’ailleurs c’est lui même qui m’a fait tant tarder pour me lancer dans l’entreprenariat.
On entend de plus en plus ce terme, il est fréquemment utilisé pour les artistes et entrepreneurs. Il est aussi appelé le syndrome de l’autodidacte. Presque 70% de la population y a été confrontée au moins une fois dans sa vie. Mais concrètement, qu’est ce que le syndrome de l’imposteur ?
C’est un mécanisme psychologique, qui fait que l’on se dévalorise complètement, il met dans un état de manque de confiance et d’anxiété qui peut ralentir notre activité, voire la paralyser complètement.
Ce malaise s’installe progressivement dans notre esprit et notre quotidien. Il nous empêche d’aller de l’avant, voire même nous fait reculer professionnellement, ou nous donne envie d’abandonner notre activité.
Il n’est pas évident de faire la différence entre la réalité et ce ressenti qui travestit la vérité.
Un sentiment de doute permanent et de dévalorisation personnelle nous donne l’impression de ne pas être à notre place. Et il est difficile de se rendre compte que ces inquiétudes ne sont pas fondées, que c’est uniquement un syndrome qui biaise la réalité. Parfois le syndrome peut nous pousser jusqu’à la dépression.
Pour réussir à vivre avec il faut premièrement se rendre compte qu’on en est victime et qu’il s’est insinué dans notre quotidien, il s’agit de la partie la plus complexe. Et bien que notre entourage joue un grand rôle dans cette prise de conscience. Tant qu’on n’a pas le déclic, on ne réalise pas vraiment que cette dévalorisation personnelle n’est qu’un leurre.
Ensuite il est possible de mettre des petits outils en place, qui peuvent nous ouvrir les yeux sur notre réelle implication dans notre travail (mais je vous en parle plus tard)
Encore aujourd’hui, après chaque séance photo je doute, je me dis que j’ai totalement loupé la séance, que les photos vont être moyennes. Un sentiment de doute me submerge comme une grosse vague. Je me sens parfois illégitime à certains projets. Et je me cache derrière beaucoup de prétextes.
Et le pire depuis que je suis freelance, c’est que j’ai constamment le sentiment de ne pas en faire assez. Il est très difficile de se rendre compte des actions accomplies pour notre entreprise, surtout pour une boulimique de travail comme moi. Je me dis tous les jours “ J’ai rien fait aujourd’hui j’aurais quand même pu faire plus.”
Heureusement que mes proches et mes copains photographes de la formation m’aident à relativiser.
Puis systématiquement, après avoir pris du recul sur mon travail je me suis dit “mais non, ces photos sont vraiment géniales !”
Alors oui, parfois j’ai besoin de l’entendre de mes confrères ou mes proches, cela permet de me rassurer et me dire “non non, la petite voix qui me dit que c’est nul c’est uniquement le syndrome de l’imposteur qui m’embête”
J’ai la chance d’avoir des consoeurs bienveillantes avec qui on échange régulièrement, et on peut se donner des avis critiques sur nos travaux respectifs. Voir qu’on n’est pas seule face à des peurs infondées, voir qu’on arrive à rebooster et être reboosté. Cela m’a beaucoup aidé, et m’aide encore quotidiennement.
Je n’ai jamais été si bien entourée que depuis que je suis “seule à mon compte”. Et pas uniquement entourée de photographes, j’ai rencontré beaucoup d’entrepreneurs/ entrepreneuses qui souffraient des mêmes maux. C’est la raison principale de ma volonté de créer un collectif d’entrepreuneuse.
J’adore aussi ma nouvelle habitude; je note dans un carnet toutes les actions mises en place pour faire avancer mon entreprise, qu’elles aient abouti ou que ce soit des actes manqués (qui au final m’apprennent à ne plus faire d’erreur)
Et lorsque j’ai des échos d’une petite voix qui me chuchote que je n’ai absolument rien fait, je relis mon carnet, et me rend compte que j’ai noirci pas mal de pages.
Alors après oui, je reste une éternelle insatisfaite et boulimique de travail, en même temps je fais le travail de mes rêves et je vie ma meilleure vie, qui peut m’en vouloir de plonger dans le bonheur comme ca ?
Finalement je remercie ce manque de confiance, car il me permet de me remettre quotidiennement en question et de toujours continuer d’évoluer. Je pense que les pires ennemis pour réussir notre vie professionnelle (et personnelle aussi) c’est un excès de confiance qui nous fait faire des erreurs et nous fait stagner, et ce syndrome de l’imposteur qui peut nous empêcher de vivre.
Il faut avoir confiance en soi et se remettre en question, parce que personne n’est parfait. S’entourer de bienveillance, et alors tout ne peut aller que pour le mieux.